6 au Volley - Épisode 8

Auteur : shiro
L'atmosphère devenait vraiment pesante, et les jeux, les faux-semblants
et les petites lâchetés avaient eu raison de la bonne humeur des
volleyeurs.

Pendant ce temps, le bar se remplissait de plus en plus, et les
musiciens des clubs alentour convergeaient vers le Coolin pour la jam
session hebdomadaire.

Lâm, que l'alcool commençait à chauffer et qui avait vu clair dans le
jeu de Jérôme, laissait ses mains redécouvrir la douceur d'une peau
féminine, Stéphane, sentant Hélène plus inaccessible que jamais,
rapprochait sa jambe de celle de la douce Florence, tandis qu'Amélie et
Camille s'envoyaient des textos. Seul Jérôme prêtait attention à
l'effervescence autour de la scène. Des sons de piano, de basse et de
trompette que l'on accorde se mêlaient en un brouhaha familier, cet
agréable chaos qui précède les sessions les plus excitantes. Jérôme
jeta un regard noir vers Lâm, trop occupé à ses ébats, puis, n'y tenant
plus, se dirigea timidement vers la scène. Il se devait de réagir, par
tous les moyens. Il empoigna le saxophone posé sur le piano, humecta
délicatement l'anche, souffla quelques arpèges et s'adressa au
pianiste : « Do you know Stella ? ». C'était son thème favori. C'était LEUR
morceau. C'est sur cet air qu'ils avaient connu leur première étreinte.
Il comptait bien toucher la corde sensible chez son ami volage. Le
pianiste répondit : « By Starlight ? Of course man !. Et se lança dans
une intro mêlant swing et mélancolie. Jérôme se tenait droit, face au
public, les mains moites et l'estomac noué par la rage qui le rongeait.
Winton, le pianiste, lui fit un signe de tête lui indiquant qu'il était
temps qu'il attaque le thème. Jérôme porta le saxophone à ses lèvres et
commença le thème, timidement. Les notes ne sortaient pas, il était
tétanisé, il cherchait dans l'assemblée un regard aimant qu'il ne trouva
pas, et ferma enfin les yeux tentant d'oublier tout ce qui l'entourait.
Pendant ce temps, le genou de Stéphane n'était plus qu'à quelques
centimètres de celui de Florence, et Amélie et Camille poursuivaient
leur conversation par textos interposés.
Les notes se succédaient, hésitantes, fébriles, mais Jérôme prit tout
de même le premier chorus. Tonalité très sombre, une improvisation
noire, obscure, comme la jalousie qui s'était emparée de chaque atome
de son corps. Il rouvrit enfin les yeux au moment de s'attaquer à la
deuxième grille. C'est alors que ses yeux embués croisèrent ceux du
plus bel être qui lui put être permis de voir. Elle était assise,
seule, au premier rang, et le fixait de ses yeux noisettes. Elle était
vêtue simplement mais dégageait cette classe naturelle qui ne
nécessite aucun artifice. Ses cheveux châtains étaient attachés
négligemment en arrière, elle les détacha, puis saisit son verre
d'Amaretto Sour, sans détacher son regard du soliste. Jérôme s'était
arrêté de jouer, il avait les yeux grands ouverts mais le monde entier
avait disparu autour d'eux. La belle se rendit compte du trouble qu'elle
avait causé et ne put s'empêcher d'esquisser un sourire. Il reprit alors
son chorus et se lança dans une improvisation complètement débridée,
pleine de bonne humeur, d'accords majeurs et de riffs endiablés. Il ne
jouait que pour elle. Elle le savait et savourait chaque note qu'il lui
offrait
Le genou de Stéphane venait enfin de frôler celui de Florence, que sa
pudeur poussait à feindre l'indifférence, et Lâm, qui sentit le
changement de style musical, comprit que quelque chose se tramait dans
son dos.
Pendant ce temps, les Sisters n'avaient plus de batterie ...
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